· 

L'accord de performance collective

Pourquoi négocier un accord de performance collective ?

L’accord de performance collective, mis en place par l’une des ordonnances « Macron » de 2017 , est un outil très souple permettant à l’employeur de s’adapter aux évolutions du marché. Il peut être lié à des difficultés économiques, mais pas nécessairement.

 

L’accord, dont l’objet est de répondre aux nécessités de fonctionnement de l'entreprise ou à préserver ou développer l'emploi, permet d’aménager la durée du travail et la rémunération. 

 

L'une des particularités du dispositif est que les stipulations de l’accord se substituent de plein droit aux clauses contraires du contrat de travail des salariés qui en acceptent l'application. Quant à ceux qui en refusent l’application, ils s’exposent à un licenciement reposant sur un motif spécifique constituant une cause réelle et sérieuse.

La mise en œuvre d’un tel accord nécessite un certain formalisme mais, malgré tout, il peut être opportun d’en négocier un, dans le cadre de la gestion post crise Covid-19, afin de remettre à plat l’organisation du travail dans l’entreprise notamment sur la durée du travail et la rémunération.

Contenu de l'accord de performance collective

L'accord de performance collective peut :

  • aménager la durée du travail, ses modalités d'organisation et de répartition,
  • aménager la rémunération dans le respect des salaires minima hiérarchiques,
  • déterminer les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise.

Les thèmes cités sont limitatifs. Ils peuvent, le cas échéant, être combinés. Ainsi, l’employeur peut, par exemple, modifier la durée du travail et le régime des heures supplémentaires, tout en aménageant (voire en diminuant) certains éléments de rémunération (taux des heures supplémentaires, baisse d’une prime…). Si l’entreprise est encore à 39 heures, l’employeur peut réduire la durée du travail à 35 heures, en baissant la rémunération. 

La difficulté sera de trouver un juste équilibre afin que l’accord puisse être conclu.

L’accord doit définir ses objectifs dans un préambule, ce dernier pouvant préciser : 

  • les modalités d'information des salariés sur son application et son suivi pendant toute sa durée, ainsi que, le cas échéant, l'examen de la situation des salariés au terme de l'accord,
  • les conditions dans lesquelles les dirigeants salariés exerçant dans le périmètre de l'accord et les mandataires sociaux et les actionnaires fournissent des efforts proportionnés à ceux demandés aux salariés,
  • les modalités selon lesquelles sont conciliées la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale des salariés,
  • les modalités d'accompagnement des salariés refusant l'application de l'accord ainsi que l'abondement de leur compte personnel de formation.

S’il est obligatoire de prévoir un préambule précisant les objectifs de l’accord, son contenu est libre, l’article L. 2254-2 C. tr. indiquant que le préambule « peut » prévoir plusieurs sujets listés ci-dessus. 

Par ailleurs, l’accord doit prévoir les clauses « classiques » de tout accord collectif : champ d’application, durée, renouvellement, révision…

La clause relative à la durée de l’accord est importante. Rappelons qu’à défaut de précision ce dernier est réputé être conclu pour 5 ans. 

Enfin, si l’accord de performance collective porte sur l’aménagement du temps de travail (modulation, mise en place de forfaits…), il doit aussi prévoir les clauses obligatoires requises dans le cadre de l’aménagement du temps de travail.

Conclusion de l'accord de performance collective

L’accord d’entreprise ou d’établissement est conclu selon les modalités habituelles : avec les délégués syndicaux s’il en existe et, à défaut, selon les modalités dérogatoires prévues par le code du travail (représentants du personnel, salariés mandatés, ratification par les deux tiers des salariés dans les TPE).

Dans les TPE de moins de 11 salariés, ainsi que dans celles de moins de 20 salariés sans CSE, en l’absence de délégué syndical, l'employeur peut conclure un accord de performance collective. Il propose aux salariés un projet d'accord, qui, s'il est approuvé par la majorité des 2/3 du personnel deviendra accord d'entreprise.

L’accord doit être déposé auprès de la Direccte.

Application de l'accord de performance collective

L’employeur doit informer les salariés par tout moyen conférant date certaine et précise, de l'existence et du contenu de l'accord, ainsi que du droit de chacun d'eux d'accepter ou de refuser l'application de cet accord à son contrat de travail. Les modalités de l’information sont prévues par le préambule de l’accord.

Acceptation de l'accord par le salarié

 

Si le salarié accepte l'application de l'accord, les stipulations de ce dernier se substituent de plein droit aux clauses contraires et incompatibles de son contrat de travail, y compris en matière de durée du travail et de rémunération, sous réserve du respect des salaires minima hiérarchiques.

 

La loi ne prévoit pas les modalités d’acceptation de l’accord. Celle-ci pourrait donc être tacite et se déduire de l’absence de refus par le salarié. À notre avis, il est préférable de requérir un accord écrit et de prévoir dans le document d’information du salarié que, passé le délai d’un mois, le silence vaut refus.

Refus de l'accord par le salarié

 

Si le salarié refuse l'application de l'accord, il dispose d'un délai d'un mois à compter de la date à laquelle il a été informé de l'existence et du contenu de l'accord et de son droit de l'accepter ou de le refuser pour faire connaître par écrit sa décision à l'employeur.

 

Ce refus l'expose à un licenciement reposant sur un motif spécifique constituant une cause réelle et sérieuse.

L'employeur dispose d'un délai de 2 mois à compter de la notification du refus du salarié pour engager une procédure de licenciement. Il doit appliquer la procédure de licenciement individuel pour motif personnel. Il ne s’agit pas d’un licenciement pour motif économique.

 

Le licenciement repose sur un motif spécifique (« sui generis ») présumé constituer une cause réelle et sérieuse, ce qui écarte l’appréciation du juge. 

 

Dans ce cas, l'employeur est tenu d’abonder le compte personnel de formation (CPF) du salarié licencié à hauteur de 3 000 € .


Les salariés dont le contrat de travail est suspendu pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle ainsi que les salariées en état de grossesse bénéficient d’une protection particulière contre le licenciement. Il n’est pas certain que le refus de l’application de l’accord de performance collective justifie la rupture du contrat de travail. 

Le refus du salarié protégé de se voir appliquer un accord de performance collective impose de saisir l’inspecteur du travail pour obtenir l’autorisation de licenciement. Ce dernier contrôle la validité de l'accord, la régularité de la procédure de proposition d'application de l'accord au salarié et le respect de la procédure de licenciement.

Modalités de négociation d'un accord d'entreprise

Les modalités de négociation d’un accord d’entreprise sont décrites ci-après de façon succincte. Pour plus de détails, nous vous conseillons de consulter votre documentation habituelle.

Négociation dans une entreprise ayant au moins un délégué syndical

Dans les entreprises pourvues d'au moins un délégué syndical, seuls sont habilités à négocier et conclure des accords collectifs avec l'employeur les syndicats de salariés représentatifs.

 

Pour être valable, l’accord collectif doit être signé par un ou plusieurs syndicats représentatifs ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés en faveur de syndicats représentatifs.

 

Si l'accord collectif a été signé par des syndicats représentatifs qui, sans dépasser 50 %, ont recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur de syndicats représentatifs, il doit être approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés. À défaut, il est réputé non écrit.

Les salariés dont le contrat de travail est suspendu pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle ainsi que les salariées en état de grossesse bénéficient d’une protection particulière contre le licenciement. Il n’est pas certain que le refus de l’application de l’accord de performance collective justifie la rupture du contrat de travail. 

Le refus du salarié protégé de se voir appliquer un accord de performance collective impose de saisir l’inspecteur du travail pour obtenir l’autorisation de licenciement. Ce dernier contrôle la validité de l'accord, la régularité de la procédure de proposition d'application de l'accord au salarié et le respect de la procédure de licenciement.

Négociation dans une entreprise d’au moins 50 salariés, sans délégué syndical

Dans les entreprises d'au moins 50 salariés sans délégué syndical, les modalités de négociation impliquent de respecter le processus suivant :

  1. Information préalable de l'intention de négocier : l'employeur doit informer les organisations syndicales représentatives au niveau de la branche ou, à défaut, au niveau national et interprofessionnel, de son intention de négocier. Cette information doit également être donnée aux membres de la délégation du personnel du CSE.
    Ces derniers disposent d'un délai d’un mois pour manifester leur volonté de négocier et indiquer, le cas échéant, leur mandatement. 
  2. Identification des partenaires de négociation À l'issue du délai d'un mois, si plusieurs interlocuteurs se sont manifestés, priorité est donnée à l'élu mandaté, à défaut, à l'élu non mandaté et, à défaut, au salarié mandaté. 
    Il convient de vérifier le contenu du mandat.  
  3. Conditions de validité de l'accord : en fonction de la qualité du partenaire de négociation, les conditions de validité de l'accord varient.
Partenaires de négociation Conditions de validité
 Élu(s) titulaire(s) mandaté(s)
  •  Signature par le ou les membre(s) mandaté(s)
  •  Approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés
Élu(s) titulaire(s) non mandaté(s) Signature par un ou des élus représentant la majorité des suffrages aux dernières élections

Salarié(s) mandaté(s)

La négociation avec un salarié mandaté n'est possible que si aucun élu ne s'est manifesté ou en l'absence d'élu, sous réserve de justifier d'un procès-verbal de carence.

  • Signature par un ou des salariés mandaté(s) par une organisation syndicale représentative
  • Approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés

L'entrée en vigueur de l'accord est subordonnée à son dépôt auprès de la Direccte. 

Négociation dans une entreprise de 11 à moins de 50 salariés, sans délégué syndical

L’employeur peut négocier avec : 

  • des salariés mandatés (élus ou non)
  • des élus du comité social et économique (CSE) mandatés ou non.

Il n'y a pas d'ordre de priorité entre les partenaires de négociation

En fonction de la qualité du partenaire de négociation, les conditions de validité de l'accord varient. 

Partenaires de négociation Conditions de validité de l'accord
Un ou plusieurs salariés (non élus) expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche ou à défaut au niveau national et interprofessionnel Approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés dans le cadre d’un référendum
Membre titulaire de la délégation du personnel au CSE (mandaté ou non) Les signataires doivent avoir obtenu la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles

L'entrée en vigueur de l'accord est subordonnée à son dépôt auprès de la Direccte. 

Négociation dans une entreprise sans délégué syndical et sans élu, dont l'effectif est inférieur à 20 salariés

Il s’agit d’une modalité dérogatoire, pour les seules entreprises de moins de 11 salariés, et celles sans élu dont l'effectif est compris entre 11 et 20 salariés, ayant un procès-verbal de carence.

 

L'employeur propose aux salariés un projet d'accord, qui, s'il est approuvé par la majorité des 2/3 du personnel deviendra accord d'entreprise. À défaut, il sera réputé non écrit. 

 

En pratique, 15 jours avant la tenue de la consultation, l'employeur doit communiquer à chaque salarié le projet d'accord

À défaut de précision dans le texte, il est recommandé une remise en main propre contre décharge ou une lettre recommandée avec accusé de réception. 

Sous le même délai, il doit aussi communiquer les modalités d'organisation de la consultation qu'il a retenues, à savoir : 

  • le lieu, la date et l'heure de la consultation : la consultation doit avoir lieu pendant le temps de travail et en dehors de la présence de l'employeur.
  • l'organisation et le déroulement de la consultation : le caractère personnel et secret de la consultation doit être garanti. En pratique, cela doit passer par le vote à bulletin de secret ou, le cas échéant, par voie électronique.
  • le texte de la question relative à l'approbation de l'accord soumis à la consultation. Il s'agit de demander si les salariés approuvent le projet d'accord.

À l'issue de la consultation, un procès-verbal de résultat doit être établi. Il doit être diffusé dans l'entreprise par tout moyen. 


Télécharger
Exemple d'accord de performance collective
Cet accord est donné à titre indicatif et doit être adapté à la situation de l’entreprise.
Exemple d’accord de performance collecti
Document Adobe Acrobat 195.5 KB